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amitiés syndicales
11 février 2012

Les paroles de Pierre Legendre

Une assistante sociale et une infirmière m'ont demandé: "à quoi ça sert de se syndiquer?".

En cherchant des arguments, j'ai pensé hier à Merleau-Ponty (voir message précédent). Je pense aujourd'hui à un autre auteur : Pierre Legendre.

Voici des extraits d'un entretien sur France Culture, sur le thème: on a le choix de « devenir un idiot ou de se construire »

« La pomme tombe sous le pommier… je suis comme la pomme: j'ai eu à faire aux parents qui m'ont enfanté. Et j'ai quelques souvenirs. Quand je suis venu au monde, c'était la détresse économique; j'ai appris au berceau ce qu'on apprend par les livres : la férocité sociale, les classes sociales, ou les castes… et la fracture du regard chez un enfant.

L'anecdote est la suivante: nous allions à l'église dans le banc des pauvres, au fond de l'église, et au moment de la quête, le prêtre passait devant sans s'arrêter. Et je me souviens avoir capté le regard un jour de celui qui faisait la quête. Les pauvres étaient dispensé de quête. Ce regard est resté ancré dans ma mémoire; c'est ça la fracture du regard. L'enfant entre dans l'interrogation, sans mots bien sûr, sur la contradiction, le hiatus, la séparation, l'exclusion…des choses essentielles que j'ai appris moi de cette façon.

Il y a deux manières d'entrer dans la vie : ou bien on devient "revendiquant", un protestataire, un pisseur de vinaigre, ou bien on en fait quelque chose. Alors moi, enfant de cette Normandie taciturne, j'ai travaillé tout ça, mais je n'ai rien à voir avec les marchands de… ça c'est très bien porté en France, ça fait même de très belles carrières : le ressentiment, la haine sociale, etc…tout ça n'est pas mon aliment, je m'alimente d'autre choses. C'est une très grande expérience d'entrer dans la vie de cette façon. Personne n'a choisi ses parents, on est enfant d'un destin qui ne vous quitte pas, le tout est de voir comment on s'accommode de hasards du destin, et comment on peut travailler à retourner subjectivement la carte. »

 Une anecdote d'écolier :

 « Le prof a dit "il faut enlever les pages de la guerre de 14". Mon père, qui avait traversé la première guerre mondiale et avait échappé au pire, ayant traversé l'enfer de Verdun, m'a dit : « il est pas question, tu diras à ton prof que ton père ne veut pas ». J'étais le seul écolier qui avait conservé les pages. Ca donne une idée de l'état d'esprit.Lles Allemands n'en demandaient pas tant! Ce conformisme, cet état d'esprit grégaire… que j'ai rencontré dans le monde académique, l'esprit grégaire, le conformisme. J'ai appris ce qu'on appelle d'un bien grand mot: la dignité. »

Une autre anecdote d'enfance :

« Ma mère n'acceptait pas de recevoir des cadeaux pour nécessiteux, et elle renvoyait les habits usés que les gens, très bien intentionnés du reste, se faisait un devoir de donner à ceux qui leur paraissait être digne de la charité publique. Ce sont des grandes leçons, qui m'ont tenu à l'écart de tous ces mouvements de …de…je ne sais comment les qualifier, de "protestataires", de grandes gueules! Je déteste les grandes gueules! qui font de grands discours, avec les hauts parleurs dans la rue, qui jouent les Lénine de Prisunic à la gare de l'est, et autres intellectuels …ça fait de très belles carrières ce genre d'attitudes, mais ça n'est pas mon fait. »

 

 

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